Nous avions, dans notre dernier article, décrit une méthode pour choisir la bonne espèce d’arbres à planter. Cette méthode tournait autour de trois axes : la situation de la parcelle, l’analyse des plantes indicatrices et enfin celle du sol.
Au cours de cette analyse, le sylviculteur regarde avec attention la biodiversité de la parcelle.
Cette biodiversité, qui est plus qu’un terme à la mode, fait partie du quotidien du forestier. Il la respecte profondément, et la promeut avec attention.
Nous sommes alors en droit de chercher la cause des attaques régulières dont les forestiers sont coutumiers concernant leur négligence vis-à-vis de la biodiversité. Pourquoi le public, les journalistes, opposent-ils de plus en plus régulièrement « gestion forestière » et « biodiversité » ?
L’objectif de cet article est d’apporter quelques exemples sur l’importance de la biodiversité dans le monde forestier, de constater quelques problèmes actuels de la forêt ; et nous évoquerons quelques solutions pour que le grand public renoue avec les forestiers.
1. La biodiversité et le forestier
Le forestier est conscient du monde qui l’entoure, de sa diversité et de sa fragilité. Il sait qu’un bon indice de biodiversité réduit les attaques de scolyte, les maladies, limite le risque de dégât dans les plantations ; qu’elle est tout simplement indispensable pour le fonctionnement des écosystèmes forestiers.
Les formations, la littérature, les journaux dédiés aux forestiers insistent sur l’importance de la biodiversité. Sachant que des illustrations valent mieux que de longs discours, je souhaiterais prendre comme exemple le numéro de Mars 2021 de « Parlons Forêt en Auvergne Rhône Alpes ». Il est intéressant d’analyser les articles dans ce numéro intitulé : « Forestiers et environnement, une alliance naturelle ».
Les articles qui s’égrènent s’intitulent :
« N’opposons pas environnement et production », le vice-président du Centre Régional de la Propriété Forestière expliquant que « la récolte de bois est un processus nécessaire à la vie de la forêt, elle en favorise la pérennité en assurant sa croissance, son renouvellement, son adaptation au changement climatique, son enrichissement, ainsi que celui de la biodiversité qu’elle abrite et protège » ;
« Prendre en compte la biodiversité dans la Sylviculture »
« L’Indice de Biodiversité Potentielle (IBP) : La biodiversité au quotidien ».
Vous pouvez lire encore de nombreux articles sur ce thème grâce au lien suivant : https://auvergnerhonealpes.cnpf.fr/n/parlons-foret-en-auvergne-rhone-alpes/n:2214
Ce magasine est un simple exemple de la littérature forestière, mais il illustre l’importance de ce thème pour le monde de la sylviculture. Les forestiers savent que toute formation intègre la biodiversité comme un élément crucial dans la sylviculture.
Discutez quelques minutes avec un professionnel de la forêt, et vous constaterez le respect qu’il éprouve vis-à-vis de son environnement.
Mais alors pourquoi le public met-il autant en doute l’intérêt du monde forestier dans la biodiversité ? Que se passe-t-il depuis quelques mois ?
2. Les problèmes de la forêt
Pourquoi voyons-nous de tels reportages comme celui diffusé sur France 5 intitulé « Sur le front des forêts françaises » ? Ce reportage a choqué de très nombreux forestiers. Passons les arguments consistant à dire que le jeune journaliste pseudo-écologiste survolait très rapidement son sujet, essayant de démontrer par tous les moyens que le forestier détruisait la forêt. Cela ne fait pas avancer le débat. Il faut regarder le fond. Le sujet est plus large que ce reportage, regardez aussi l’image à droite, avec des personnes manifestant contre les coupes rases.
Tout d’abord ne soyons pas dupes. L’industrie a besoin de bois et a standardisé ses besoins.
L’idéal pour l’industrie du bois est de réaliser des coupes rases de résineux de 35 cm de diamètre. Beaucoup de scieries ont été dimensionnées pour ce type de bois. Les prix du bois ayant augmenté, les acteurs de la forêt réalisent des coupes rases, avec dans certains cas des abus ; ces coupes étant réalisées trop tôt ou sont sur des surfaces trop importantes.
Une coupe rase n’est pas un souci en soi, elle est l’aboutissement d’un travail de 40 ou 50 ans pour les résineux, mais sa surface doit être limitée. Elle doit être maîtrisée, et doit rester raisonnable.
Soyons réalistes, une surface rasée est traumatisante pour le public.
Le forestier doit expliquer la nécessité de faire ces coupes. L’idéal serait de pouvoir faire des coupes jardinées, sélectionnant les plus beaux arbres et permettant à la forêt de pousser en continue. Malheureusement, il faut trouver les bûcherons, avoir des surfaces suffisamment grandes, et être dans de bonnes conditions pour favoriser la régénération naturelle. Réaliser une telle sylviculture est complexe, requiert une forte technicité et une forte charge de travail que le public n’appréhende pas toujours.
Il est crucial de former tous les acteurs de la chaîne forestière : les propriétaires, les ETF (Entreprise de Travaux Forestier) et l’industrie forestière.
Le bon propriétaire connait sa forêt, et doit savoir quand couper ses arbres et s’il veut les couper !
Les ETF doivent aussi être raisonnables et bien conseiller les propriétaires.
La forêt est un équilibre environnemental, sociétal et économique.
Il faut savoir répartir des coupes en plusieurs fois. Par exemple faire 2 coupes bien séparées de 2ha, plutôt qu’une coupe de 4ha. Il faut aussi savoir aussi replanter plusieurs essences sur une même parcelle lorsque cela est possible, pour favoriser la biodiversité. L’industrie doit s’adapter à la nature, et pas l’inverse.
Tout ceci est, comme toujours, une question d’équilibre.
Conclusion
Les acteurs du monde de la forêt doivent prendre les critiques de manière ouverte et travailler dessus. Ce triptyque environnemental – sociétal – économique doit être équilibré pour chaque acteur :
- Les propriétaires, qui respectent leurs forêts et en demandent un minimum de revenus,
- Les industries qui ont besoin de bois, et doivent s’adapter au mieux aux ressources
- Les Entreprise de Travaux forestiers qui doivent pouvoir vivre de la forêt,
- Le grand public qui doit mieux s’ouvrir et comprendre les enjeux de la forêt.
Des campagnes de publicité sont régulièrement réalisées pour le grand public, mais il faut faire plus. Tous les acteurs de la chaîne doivent être formés, et la biodiversité doit être prise en compte à chaque étape de la chaîne.
Chez Sylvair, ce travail de formation fait partie de la philosophie que nous développons : nous informons les entreprises sur les techniques de sylviculture, sur l’importance de la biodiversité que nous mettons en pratique.
Par exemple, les dernières plantations que nous avons réalisées l’ont été avec les essences suivantes : Robinier faux acacias ; Pin Laricio de corse ; Cèdre de l’Atlas ; Douglas. Nous souhaitons faire des plantations en mélange chêne rouge et Douglas, pour promouvoir cette biodiversité. Lors de nos plantations, nous gardons toujours des feuillus sur les parcelles, pour sauvegarder cette biodiversité (voir image ci-dessus). Nos clients le comprennent et le demandent. C’est avec ce type de logique que nous continuerons à développer les forêts françaises, et que les sylviculteurs seront reconnus comme des acteurs cruciaux de la biodiversité par le grand public, sans une mise en opposition systématique.
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